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Raymond Gleize,
Division des Études Locomotives SNCF

VOITURES DYNAMOMÈTRES DES RÉSEAUX FRANÇAIS

D'après un article de Mr P. PLACE, ingénieur principal à l'Office Central d'Etudes de Matériel de chemin de fer (OCEM)
Revue Générale des Chemins de Fer - avril 1933.

En 1929, l'Office Central d'Etudes Matériel de Chemins de fer (O.C.E.M.) a été chargé de mettre au point des voitures dynamomètres modernes et qui devaient être utilisées en commun par les grands Réseaux, afin de remplacer des voitures dynamomètres de construction ancienne et qui ne répondaient plus suffisamment aux besoins.
L'O.C.E.M. a ainsi étudié et fait construire quatre voitures dynamomètres.

Ce sont des voitures à bogies, métalliques, du nouveau type de l'Office, c'est à dire sans rivet apparent. Elles sont dans leurs dispositions générales conformes au diagramme ci-dessous.

diagramme voiture dynamomètre

Les quatre voitures sont munies d'un appareil et d'une table dynamométriques, ainsi que d'appareils enregistreurs de températures, de pressions, etc.
De plus, les voitures I et II sont équipées pour les essais de frein, tandis que les voitures III et IV le sont pour l'enregistrement des mouvements relatifs des caisses et des bogies.

Voici la liste des éléments présents sur ces voitures et décrits ici :
Systèmes d’enregistrements pour :

Les appareils et tables dynamométriques ont été construits par la société Amsler.
Le dynamomètre proprement dit est hydraulique. Il comporte deux tampons articulés entre eux et un crochet de traction relié par un balancier à deux cylindres opposés, destinés à travailler l’un à la traction et l’autre à la compression.

Schéma du dynamomètre hydraulique Schéma du dynamomètre hydraulique

Les appareils sont toujours prêts à enregistrer les efforts, soit ceux de traction, soit ceux de compression. Ces efforts sont mesurés par le déplacement d'un petit piston de la presse hydraulique qui constitue l'appareil dynamométrique. Il est équilibré par un ressort étalonné.
Deux manomètres gradués en tonnes indiquent à chaque instant l'effort de traction pour l'un, et l'effort de compression pour l'autre. Chacun de ces manomètres est muni d'une seconde aiguille folle, qui, poussée par la première, reste dans la position correspondant à l'effort maximum exercé sur un parcours donné.

Le travail au crochet de traction est enregistré sur le papier à diagrammes. On peut enregistrer en kilogrammètres le travail produit soit par l'effort de traction soit par l'effort de compression, on passe d'un enregistrement à l'autre par la manoeuvre d'un robinet inverseur. L'enregistrement du travail de compression a été prévu pour les essais de freinage.

La vitesse est enregistrée et indiquée. L'enregistrement sur le papier à diagrammes peut être fait à deux échelles différentes, dont le maximum est 75 km/h ou 150 km/h.

Enregistrement du temps. Un petit moteur électrique pourvu d'un régulateur à boules tourne à vitesse rigoureusement constante. Il assure le fonctionnement de tous les appareils de mesure de la table dont les déplacements doivent être proportionnels au temps.

Afin de permettre l'enregistrement de l'espace parcouru, le déroulement du papier de la table dynamométrique se fait par engrenages montés sur un essieu non freiné du bogie le plus voisin. Pour tenir compte de l'usure progressive du bandage, trois paires d'engrenages de rapports différents sont prévues, qui permettent d'utiliser cet essieu sans changement des bandages, jusqu'à ce que leur diamètre d'origine soit diminué de 2 %. L'erreur est au maximum de 0,33 à 0,34 %. .
Le papier enregistreur de la table se déroule proportionnellement au temps ou à l'espace parcouru.
Le passage de l'un des modes de déroulement à l'autre peut se faire en marche sans interrompre les enregistrements.
Chaque kilomètre est repéré automatiquement sur le papier à diagrammes.

Enregistrement des forces d'inertie et de la gravité. Ces forces sont mesurées par les déviations d'un pendule d'inertie dont l'axe de rotation est horizontal et perpendiculaire au plan de symétrie de la voiture.
Ces forces sont enregistrées ainsi que leur travail.

Divers stylets enregistreurs disponibles sur la table dynamométrique, reliés à des électro-aimants peuvent être mis en action par la manoeuvre d'un appareil quelconque de la locomotive : cela permet d'enregistrer le moment où s'effectue une manoeuvre relative au fonctionnement de la locomotive. On peut ainsi, par exemple, enregistrer la manoeuvre du régulateur et celle du robinet de frein.

Table dynamomètrique Amsler Mais les indications les plus intéressantes à relever sont toutefois les températures et les pressions.
Des pyromètres à résistance peuvent être placés sur la locomotive pour déterminer la température. Leurs indications sont transmises à des appareils enregistreurs situés dans la voiture dynamomètre.
Il existe dans chaque voiture quatre appareils enregistreurs, comprenant chacun un galvanomètre qui est relié toutes les dix secondes successivement à six pyromètres. Un même appareil permet donc d'enregistrer successivement les températures en six endroits différents. Une couleur est utilisée par pyromètre, l'enregistrement sur une bande enregistreuse est effectué sous forme de six courbes de couleur différentes.

Différents enregistreurs sont disponibles : deux pour les gaz chauds de la boîte à fumée (mesure de 100 à 300°C ou 200 à 600°C).
Un troisième pour l'air ou l'eau (mesure de 0 à 160°C ou de 0 à 320°C).
Un quatrième pour la vapeur saturée et surchauffée (mesure de 0 à 250°C ou de 150 à 500°C).

Les pressions (et les dépressions) sont mesurées et indiquées par des manomètres placés sur la locomotive. Les indications de ces appareils sont transmises électriquement dans la voiture dynamomètre ; elles sont enregistrées par des appareils exactement semblables aux enregistreurs de température. Les dépressiomètres sont des appareils à membrane.

Il existe dans chaque voiture un analyseur des gaz de la boîte à fumée alimenté par une petite pompe d'aspiration et une conduite venant de la boîte à fumée ; cet analyseur est basé sur le principe de la différence de conductibilité thermique entre les différents gaz. Ses enregistrements : teneurs en CO² et en CO + H².

Un compteur de vapeur de chauffage du train, inséré sur la conduite générale de chauffage qui passe sous la voiture dynamomètre, permet de connaître la quantité de vapeur utilisée au chauffage du train. Ce compteur permet d'enregistrer un débit allant jusqu'à 2 500 kg à l'heure d'une vapeur dont la température peut atteindre 450° et la pression varier de 3,75 à 9 kg/cm².

Avec les voitures dynamomètres, peuvent être employés pour les essais des compteurs à eau d'alimentation montés sur la locomotive. Ces compteurs sont des compteurs volumétriques à pistons établis pour un débit horaire normal de 18 m3, pour une pression de refoulement pouvant atteindre 30 kg/cm² et une température de l'eau allant à 235°C.
Les indications de ces compteurs d'eau sont relevées par lecture directe sur des compte-tours gradués en litres montés sur l'appareil lui-même ; elles sont, en outre, répétées dans la voiture.

Tous les appareils enregistreurs de températures, de pressions et analyseurs sont montés dans un seul meuble.

Les appareils pour les essais de frein (voitures I et II) comportent un triangle de frein muni de cylindres dynamométriques pour la détermination de la pression radiale et de la pression tangentielle de freinage aux sabots.
Ces pressions sont indiquées par deux manomètres montés sur la table des appareils et tracées sur le papier. Sont également enregistrées les pressions d'air au réservoir principal, au réservoir auxiliaire et dans deux cylindres à frein.
Des contacts électriques peuvent être montés sur la conduite générale du frein d'un train afin d'étudier la vitesse de propagation de l'onde de freinage.
Pour mesurer la longueur de parcours de freinage depuis la manoeuvre du frein jusqu'à l'arrêt, un compteur gradué en mètres est actionné par le mouvement pris sur l'essieu de la voiture. Il est embrayé automatiquement par électro-aimant lors de la manoeuvre du robinet de frein du mécanicien.

Il peut être intéressant d'enregistrer certains mouvements relatifs entre deux pièces d'une voiture, tels que ceux provenant des variations de flèches des ressorts de bogie ou de la traverse danseuse.
La transmission du mouvement relatif des deux pièces en question à la pointe qui trace ce mouvement sur la table a lieu au moyen d'un fin câble métallique attaché à l'une des pièces ; il est conduit à la table des appareils, qu'il traverse perpendiculairement à la bande de papier à diagrammes, en laissant sur cette bande une inscription à l'aide d'une plume traçante. Il y a dans chaque voiture (voitures III et IV) huit câbles semblables.

Enfin, un téléphone permet la communication dans les deux sens entre la locomotive et la voiture dynamomètre, soit à l'écouteur combiné, soit en haut-parleur à amplification par lampes.
Des périscopes situés l'un à l'extrémité de la salle des appareils, côté plate-forme, l'autre à l'extrémité opposée de la salle de travail, permettent de voir les signaux et la plate-forme de la locomotive.
Il était nécessaire d'établir de nombreuses connexions électriques entre la locomotive et la voiture dynamomètre pour les circuits des pyromètres, manomètres, dépressiomètres, téléphones, klaxon, indications de la manoeuvre des appareils de la locomotive, etc.
Il a été prévu 90 fils de 50 mètres de longueur ; un certain nombre d'entre eux seulement sont utilisés au début, les autres devant servir pour de nouveaux appareils ou pour remplacer des fils rompus.

Exactitude des mesures.

Il a été imposé aux fournisseurs des appareils des conditions minima d'exactitude. Des essais effectués en usine ont permis de vérifier que l'exactitude était supérieure à celle qui était imposée.
Voici un exemple des conditions imposées et les résultats des essais de contrôle sur les appareils dynamométriques de l'une des voitures
  Conditions de l'essai
Vitesse calculée 30,09 km/h 60,70 km/h 99,88 km/h
Approximation
imposée
Approximation  obtenue
Vitesse moyenne ± 1,5 % + 0,68 % - 0,69 % + 0,18%
travail au crochet ± 3,5 % + 1,6 % + 1,67 % + 1,55 %
Puissance au crochet ± 5 % + 1,08 % + 2,89 % + 2,56 %
Travail des forces d'inertie ± 3,5 % - 0,49 % - 0,38 % - 1,40 %

De plus, il fallait de plus s'assurer que la précision obtenue lors de la construction se conserve au cours du service.
Afin de pouvoir vérifier très rapidement et sûrement l'exactitude de l'enregistrement des efforts de traction et de compression, il a été disposé en permanence sur la barre de traction un dispositif permettant l'emploi d'une boîte de tarage étalonnée elle-même sous des charges directes (poids). Ces boîtes de tarage, très précises, étaient établies pour l'étalonnage officiel des machines à essayer les métaux.

Histoire de mon Père Raymond Gleize à la SNCF avec André Chapelon de 1937 à 1953.
Participation aux essais de locomotives à vapeur : photos et souvenirs.


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